Description et argumentation de ma production
J’ai pris cette photographie lors de l’installation des œuvres prêtées par le FRAC Bretagne dans le cadre de l’exposition En toutes lettres, organisée par le groupe d’étudiants Cellulart dont je fais partie et leur formateur en Arts Visuels. Elle est extraite d’un reportage photographique qui retrace toutes les étapes de ce moment important et attendu par toute la Cellule. L’exposition a été accueillie pendant un mois par l’IUFM. L’objectif de cette ZAT (Zone d’Art Temporaire) était de recevoir des classes costarmoricaines de cycle 3 et de leur proposer une visite pédagogique accompagnée d’ateliers créés en lien avec les œuvres présentées. Les membres de Cellulart ont élaboré pour l’occasion un dossier pédagogique qui resitue les pièces exposées dans leur contexte artistique et amène des pistes de réflexions exploitables avec des élèves d’école élémentaire. Les ateliers ont également été travaillés collectivement, autour de toutes les œuvres et selon les sensibilités de chacun des intervenants. Nous les avons conçus dans un esprit de diversité et de découverte de différents média, supports ou outils. En effet, l’exploration de nombreuses pratiques artistiques était en effet possible à travers les activités que nous avons proposées. De la peinture à la photographie, du dessin à la calligraphie, et même du collage au cadavre exquis, les élèves ont pu s’essayer à diverses formes d’art.
Cette photographie s’est imposée à moi pour plusieurs raisons. D’abord pour son aspect documentaire et mémoriel. En effet, l’expérience menée par Cellulart a été je pense importante, au moins pour ses membres et pour les différents acteurs du projet. Il m’est donc apparu important de fixer « sur la carte SD » un des moments importants de notre travail et ainsi de garder trace de ce temps éphémère de la galerie d’art. Ensuite, sa composition troublante, son cadrage au ras du sol et la présence d’éléments apparemment sans rapport m’ont paru intéressants. Elle donne au spectateur l’occasion de voir des œuvres d’art dans des circonstances inhabituelles, à savoir posées au sol, à peine déballées, dans un décor de chantier évoqué par la présence de la perceuse. La confrontation entre l’œuvre de Raymond Hains, Espana, et l’outil est explicitée par la différence de plan entre les deux objets et par le câble électrique qui vient couper l’image en deux parties égales. Ce câble vu comme une ligne de démarcation est d’ailleurs l’élément le plus net de l’image. Il est au centre de l’image, net dans un espace à faible profondeur de champ (f/5.6). D’un côté le domaine de l’Art, avec ces tableaux qui attendent de retrouver leur digne place au mur, et de l’autre, le monde de l’artisanat, du bricolage, proche parent parfois délaissé de la création artistique. Sur ce cliché, ces deux territoires complémentaires sont réunis, avec peut-être une pointe de défi dans le camp de l’artisanat, symbolisé par le foret de la perceuse pointé droit vers les œuvres. Enfin, selon ces interprétations, cette production fait référence aux ateliers menés avec comme œuvre de départ Bataille, de Richard Baquié. En effet, on retrouve la coexistence de deux éléments qui, s’ils ne sont pas contraires, renvoient à des images différentes. L’étrangeté naît du double emploi de la perceuse, à la fois outil de construction et instrument de destruction (mais pas seulement) si on en détourne l’usage premier. Rappelons que le détournement de la perceuse a déjà été pratiqué par des musiciens qui ont transformé cet outil en instrument de musique (Glenn Branca, artiste de la scène no-wave s’en servait pour jouer de la guitare). A partir d’un simple instantané, de nombreuses pistes d’approche sont possibles.
Œuvre de référence :
J’ai choisi cette photographie de Willy Ronis pour deux raisons. Premièrement, cet artiste aborde les mêmes questions que celles proposées dans la situation pédagogique qui suit. C’est-à-dire la recherche esthétique et artistique dans une photo qui témoigne d’un moment réel et quotidien. Le nom donné à la récente exposition sur l’artiste à la Monnaie de Paris résume ce parti pris, La poétique de l’engagement. Deuxièmement, cette œuvre entre en résonance avec la production que je propose par les liens qu’elle crée entre l’artisanat et l’art. L’artiste photographie un artisan qui produit une pièce unique, une œuvre.
Transposition didactique :
– Le travail autour de la technique photographique numérique :
o L’utilisation d’un appareil photo reflex numérique
o Les différents plans, la composition
o La profondeur de champ
– La lecture d’image
o La ou les significations
o L’éveil du regard critique : une image peut dire beaucoup
– Le reportage
o Ecriture
o Choix du médium
o Choix des images
– Utilisation des TICE lors du traitement de la photo à l’aide d’un logiciel de retouche type Gimp ou Photoshop.
– Transversalité et Histoire des Arts : une approche de l’art photographique, de ses techniques et de ses grandes figures.
Situation pédagogique :
- Séance proposée pour le cycle 3
Thématique : Réalisation d’un reportage photographique visant à mettre en valeur les productions des élèves réalisées depuis le début de l’année.
Contrainte : Respecter les deux « lois » du photoreportage, délivrance d’un message et esthétique des images.
Objectifs :
– acquisition de savoirs et techniques spécifiques à la photographie.
– justifier des choix esthétiques qui servent à transmettre une idée.
– développer son esprit critique.
– faire des choix collectivement, notamment éditoriaux et les justifier.
– comprendre et créer la trame narrative d’un reportage.
Déroulement :
Lors d’une première séance, les élèves rassemblent une collection de productions réalisées depuis le début d’année (ou de cycle). Ils doivent discuter, argumenter et justifier leurs choix d’éléments à exposer. Pendant cette séance collective, deux élèves (ou trois selon le matériel disponible) photographient les échanges qui ont lieu. Il s’agit pour eux de traduire par une image fixe les caractères principaux d’un moment de vie. Ils pourront exprimer par exemple le mouvement, l’agitation qui règnent lors du déballage en créant des flous de bougé sur leurs clichés, ou bien surprendre un débat vif au sujet d’une production. La matière produite constituera la première partie du reportage, sur les préparatifs du projet de mise en valeur du patrimoine artistique des élèves de l’école.
Lors d’une deuxième séance, tous les élèves installent les productions sélectionnées selon une mise en espace prédéfinie collectivement. Certains vont ensuite être chargés de photographier ces productions, en travaillant notamment sur l’éclairage et les ombres. Il s’agit de représenter de manière objective ce qu’ils photographient afin de mettre en avant ces objets sujets du reportage. D’autres élèves photographient l’évènement de façon plus distanciée, avec des cadrages beaucoup plus larges, d’où transparaissent le mouvement et le travail accompli.
La troisième séance sera consacrée au tri et à la sélection des clichés puis à leur traitement informatique et pourquoi pas leur impression.
Bel exemple de parti-pris audacieux et de « point de vue »;
« l’angle » d’ attaque choisi » focalise » toute notre attention et » témoigne « visuellement de l’engagement suivi toute l’année.
C’est du sérieux, « y-a pas photo ! »